0

Aucun produit dans le panier

Select Page

BRUNO ROCUET

Un homme fou de son sport…

BRUNO ROCUET EST ISSU D’UN MILIEU MODESTE, BIEN LOIN DES CHEVAUX. AUJOURD’HUI, IL PORTE UN REGARD LUCIDE SUR CE PETIT APPARTEMENT DE DEUX PIÈCES, OÙ IL A GRANDI, AVEC SES DEUX FRÈRES CADETS, JUSQU’À L4ADOLESCENCE…

“CES SOUVENIRS RESTENT GRAVÉS EN MOI; ILS M’ONT FORGÉ…

Bruno Rocuet est issu d’un milieu modeste, bien loin du monde des chevaux. Aujourd’hui, il porte un regard lucide sur ce petit appartement de deux pièces, où il a grandi, avec ses deux frères cadets, jusqu’à l’adolescence. Il n’oublie pas non plus ces frissons qui le traversaient, chaque fois qu’il passait devant la pancarte d’un club hippique, avec ce ressenti si puissant qui vous attrape, et que vous n’expliquez pas forcément. Il y avait bien ce grand-père maternel, commerçant dans l’âme, qui achetait et revendait vaches et chevaux au gré des foires. Peut-être Bruno avait-il, inconsciemment, hérité de cet esprit marchand. Avec la force des gens passionnés, malgré son jeune âge, il enchaîne les travaux pénibles, comme laver les trains, la nuit, dans sa ville natale de Quimper, pour acheter un ticket de bus, et s’offrir ses premières leçons au centre équestre voisin. Il sympathise avec les jeunes de sa génération, qui l’accueillent, comme un nouveau membre de leur famille. Bruno est le copain passionné, parfois le groom, et il assiste aux premières compétitions de ses camarades, comme simple spectateur certes, mais toujours émerveillé ! A la maison pourtant, les disputes étaient fréquentes. Sa mère, qui imaginait pour son fils une carrière de contrôleur-laitier, répète sans cesse : « Bruno, tu dois finir tes études, cette vie n’est pas pour toi ! ». Il y avait un tel décalage entre le monde ouvrier de ses parents et l’univers équestre qu’il découvrait. Et il aura fallu laisser passer beaucoup de temps avant que cela ne change. Un jour, un mariage, un fils entouré de sa future femme, de ses deux enfants et de tous ses amis… et les quelques mots d’une mère, que Bruno espérait secrètement depuis si longtemps : « Je sais à quel point nous ne t’avons pas incité à être celui que tu es devenu, mais aujourd’hui je suis tellement fière de toi ». 

SE BATTRE, AVEC UN COURAGE AUSSI FORT QUE LA PASSION…

Il faut croire que Bruno Rocuet était peut-être encore plus passionné, plus enragé que certains autres, mais comme il aime à le répéter : « De toute façon je n’avais pas le choix, puisque je ne partais de rien ! ». Son ambition secrète était de grandir et de se faire un nom dans ce milieu qu’il aimait tant ! Peu importe l’énergie qu’il fallait y mettre, et les sacrifices demandés, il voulait provoquer sa propre vie, pour qu’il se passe quelque chose. Depuis des années, ces chevaux il ne pouvait pas les monter bien sûr, mais il pouvait au moins les regarder. Bruno les observe, chaque jour, il apprend chaque ligne du stud-book au pensionnat, après les longues journées d’études, il mémorise les origines, paternelles, maternelles, il lit et relit cent fois les magazines L’Eperon, jusqu’à les connaître par cœur. Oui, ne penser qu’à ça, ne vivre que pour ça ! Ce n’était pas une obsession, mais cela faisait partie de lui, profondément, intensément, tout simplement ! Quand il va voir, pour la première fois, le CSIO de France à La Baule, aux portes de sa Bretagne natale, Bruno est comme un enfant émerveillé ! Comment aurait-il pu imaginer à cet instant, même dans ses rêves d’adolescent les plus fous, qu’il gagnerait la Coupe des Nations, sur ce même terrain en herbe du Stade François André, bien des années plus tard ! Pour atteindre son rêve assumé, il lui aura fallu tracer sa route sans trop se préoccuper de ce que les gens disaient de lui. Bruno entraîne les pur-sang à la piste, débourre des yearlings… et son diplôme agricole en poche, il obtient un prêt jeune agriculteur, qui lui permet d’acheter son premier cheval, Lutin de la Porte, dans un petit club proche de chez lui. Revendu peu de temps après, le fils du pur-sang Arlequin de Grimou s’illustrera sur les pistes internationales sous la selle d’Edouard Couperie…

À FONTAINEBLEAU, J’EN AI PRIS PLEIN LE COEUR ET PLEIN LES YEUX!

Bruno Rocuet de souvient encore de cette période, quand Eric Navet ou Xavier Leredde, ses idoles de l’époque, remportaient tous les Grand Prix organisés en Bretagne. Les deux cracks cavaliers sont de sa génération, et ont déjà le statut de véritables stars. A l’occasion de vacances scolaires, Bruno a l’opportunité de partir en stage au Haras des Rouges, groomant Xavier et l’accompagnant sur les plus beaux terrains internationaux, où il se nourrit avec gourmandise de cette nouvelle expérience qui lui est offerte. C’est ce lien avec Xavier qui lui permettra, quelques années plus tard, d’intégrer le CSEM de Fontainebleau, pour y faire son service militaire. Bruno l’avoue encore aujourd’hui, avec un large sourire accroché aux lèvres, cette affectation, c’était le graal ! Nous sommes en 1980, l’année des Jeux Olympiques de remplacement, et l’écurie fédérale est installée là, sous ses yeux. L’équipe américaine, qui comme de nombreuses autres nations, boycotte les Jeux Olympiques de Moscou, est présente également à Fontainebleau, avec ses meilleurs représentants. Tous les jours, dans son treillis, Bruno observe le travail des chevaux et cavaliers qui l’ont toujours fait rêver, sous le regard d’un Marcel Rozier alors entraîneur national, secondé par Daniel Biancamaria. Frédéric Cottier et Flambeau C, Gilles Bertran de Balanda et Galoubet A, Jean-Marc Nicolas et Mador, Hervé Godignon et Faolo d’Escla sont tous là, et remporteront la mythique Coupe des Nations à Aix-la-Chapelle cette même année ! Le jeune breton exilé pour quelques mois venait de basculer dans une autre dimension des sports équestres, conscient que Fontainebleau resterait à jamais pour lui un lieu particulier. Quand un endroit a marqué à ce point votre vie de jeune adulte, qu’il a véritablement ouvert la voie, alors pas étonnant qu’il soit le théâtre de tant de victoires et de belles histoires, même des années plus tard. On dit que les gens vous rendent l’amour et le respect que vous leur vouez… les lieux aussi apparemment !

À CHAQUE ÉTAPE DE MA VIE, ON M’A DONNÉ MA CHANCE

De retour en Bretagne, mais sans emploi, Bruno achète avec l’argent du chômage une pur-sang qui l’emmènera jusqu’au niveau ranking de l’époque. Les propriétaires commencent à lui accorder leur confiance. Bruno s’implique fort, travaille dur, et remporte avec Bonheur des Saules son premier Championnat à Fontainebleau. Tout juste auréolé de son titre, il est invité aux ventes Fences Elite, à la table de François Mathy et de Yves Lauwers, à la tête du célèbre Haras des Hayettes. Sur la piste, présenté par Elisabeth et Patrice Millot, un magnifique mâle fils de Laudanum vient d’être adjugé pour 600.000 francs, réalisant le Top Price de la soirée. En quelques secondes la décision est prise : Du Gâteau rejoindra les écuries de Bruno Rocuet pour le compte de monsieur Lauwers. Avec 14SF/14, le couple remportera le Trophée Fences du meilleur quatre ans l’année suivante, et le Haras des Hayettes aura jusqu’à quinze chevaux chez Bruno. Quelques années plus tôt, c’est en rencontrant François Leiser, propriétaire alors de la célèbre crack Carlina de Pius Shwizer, qu’une autre belle histoire allait s’écrire. Bruno vient d’acheter Ryon d’Anzex, un magnifique mâle de quatre ans. A l’occasion des cycles classiques de Saint-Lô l’année suivante, l’homme d’affaire, amoureux des anglo-arabes, s’offre le génial fils de Massondo, mais souhaite que le cheval poursuive sa carrière sous la selle du cavalier breton. Ryon d’Anzex sera revendu un million d’euros à San Patrignano, et évoluera au plus haut niveau sous la selle de Fernando Fourcade, représentant l’Espagne dans les plus gros championnats et CSIO5*. Une transaction qui aura permis à Bruno Rocuet d’acheter l’ancienne écurie de trotteurs, à Saint-Helen, dans laquelle il est installé aujourd’hui : « Je n’étais rien à l’époque, et monsieur Leiser m’a donné ma chance, je lui dois tout ! », avant d’ajouter : « Peu importe le talent, la passion ou le courage, ce sont finalement toujours les rencontres qui dessinent votre parcours ! ».

 

Textes Thomas Millot – Photos Collection privée.